Un matin, je prends l’ascenseur.
J’ai mes écouteurs dans le cou, par respect au cas où quelqu’un entre en même temps; je veux pas paraître asociale; le bon voisinage, c’est important, surtout quand t’as une centaine de voisins proches, tsé.

Comme de fait, une femme, début trentaine, entre dans l’ascenseur et me parle de la température.

Ah, quelle chaleuwr! *Avec accent anglais*

On finit par marcher jusqu’au métro ensemble et parler.
Je sais qu’elle vient de Winnipeg, qu’elle a un nouveau copain, plus jeune qu’elle, qui vient du lac Saint-Jean. Elle travaille en comptabilité où ils ont un environnement PC, mais elle aimerait changer pour Mac éventuellement, parce que tout le monde a des iPhones, et aimeraient synchroniser leurs trucs sur le même système d’exploitation. Je sais aussi qu’elle vit dans un studio et qu’elle a trop d’amis à accueillir à Montréal. Et elle adore Montréal.

J’ai aussi parlé de moi, mais vraiment peu: elle ne connaît pas la nature de mon emploi, ma vie amoureuse, à quel étage je vis, ni si je compte inviter des amis chez moi.

Wow.

Je la recroise hier en revenant du travail.
Elle a un chien en laisse (Super interdit dans l’immeuble…)

– C’est Sophia, c’est ça?

Elle me confirme que oui. (Je me souviens bien de son nom yesss. J’améliore mes skills de mémoire de prénom). L’air un peu fatigué, elle n’ajoute rien, ne semblant pas me reconnaître. On entre dans l’ascenseur et me dit que son chien a hâte de retrouver l’autre à l’appartement. Okayyy…

***

Hypothèse #1

Sophia a le même trouble que la fille dans 50 first dates, où la fille oublie toute sa vie à chaque soir. Et elle a oublié qu’avoir des animaux était interdit. Et a dû oublier aussi tous les avertissements qu’elle a eus.

Hypothèse #2

Je n’ai pas assez parlé de moi. Donc je n’existe pas.