Après-midi comme un autre. Encore tranquille comme c’est le début de session au café; pas encore de rush d’études.

Je jase avec un client. On passe de small talk à l’analyse de grandes généralités: pourquoi les gens sont malheureux, pourquoi tant de gens ne vivent pas de ce qu’ils aiment.

À l’autre bout du comptoir, ma collègue parle avec un autre client de possibilités de carrière, de voyage, de développement de compagnie, de tout ça en même temps.

*

Mon interlocuteur en arrive à la conclusion que nos existences sont définies par la publicité, le désir d’être heureux en faisant l’acquisition de la voiture de l’année. Je tente de relativiser en ajoutant que notre background culturel nous fait baigner dans bien davantage que tout ça.

Notre famille proche est notre plus grande influence, je trouve. En famille, on peut lutter contre tout ça, se construire une opinion de la culture populaire à contre-sens. Quand on est une famille de six comme la mienne, c’est d’autant plus fort. Mais je ne mentionne rien de ma famille à mon interlocuteur, je me garde une petite gêne.

On termine la conversation, je vais dans l’arrière-boutique:

– Wow, des grosses conversations de marketing.

Ma collègue renchérit et explique que ce client, celui à qui elle parlait, lui redonne toujours confiance en les multiples possibilités de la vie. Je comprends qu’elle croyait que j’avais entendu sa conversation.

– Eheh ben coudonc, ça parlait de marketing de mon bord aussi. Plus des restrictions que des possibilités, mais bon. C’est drôle.

Je jette un regard vers l’aire de vente, nos deux clients parlent ensemble. Je gagerais qu’ils parlent de marketing. Ça doit faire des débats enflammés, j’aurais aimé écouter ça.