Ma mère me parlait au téléphone et semblait étonnée de voir mon enthousiasme diminuer quelques jours après ma chirurgie.
Je ne réalisais pas trop que ce n’est pas demain que je pourrai me chixer, faire disparaitre ma démarquation de lunettes sur le nez, aller boire un verre sur une terrasse, me baigner et sortir tard aller danser.
Pour l’instant, je passe l’essentiel de mon temps dans ma chambre, déchirée entre partir le ventilateur pour avoir moins chaud, mettre des gouttes dans mes yeux chaque 15 minutes OU BIEN, toffer la chaleur dans ma chambre, les rideaux tirés en essayant de me distraire autrement qu’en regardant un écran ou en allant marcher dehors. Je fixe le plafond, beaucoup. J’ai un mal de tête de fatigue oculaire qui part et revient.
La seule chose qui me distrait sans faire forcer mes yeux, ce sont les contacts humains. Parler au téléphone, jaser avec mes colocs, leurs amis quand ils passent. Et comme je suis pas le genre à inviter toujours du monde chez moi et appeler mes amis au téléphone, je déprime un peu. Et ma job de service à la clientèle me met mal à l’aise, parce que j’ai des taches rouges dans les yeux. Meh.
*
Je suis allée au restaurant lors d’une belle soirée et j’ai demandé à la serveuse d’être à un endroit pas trop ensoleillé, parce que, yeux obligent. Elle est devenue toute enthousiaste, m’a posé des question et m’a raconté ceci:
– Tsé avant je travaillais dans un autre resto, pis y’avait une cliente qui me regardait pas dans les yeux, pis ça ça me tanne tsé, j’aime ça regarder le monde dans les yeux, sinon j’les trust pas. Pis rendue sur la terrasse, elle avait mis ses lunettes de soleil, même s’il faisait pas un gros gros soleil. Je la trouvais effrontée et snob. J’ai su après qu’elle s’était fait opérer au laser, je capotais! Maudite belle leçon de vie! Je m’en rappellerai toujours, de celle-là, faut jamais juger avant de connaître!