Dernier cours de la session. Mon professeur de dessin nous laisse dessiner le modèle nu et observe derrière nous pour nous aider à peaufiner nos traits. Il s’arrête et suggère à une étudiante d’y aller plus franchement avec son 4B et ça la fait rire, parce qu’elle n’ose pas.

Et voilà, le sujet de la confiance est sur table. Peut-être trouve-t-elle ça plus joli avec des traits plus fins, peut-être est-ce que ça correspond mieux à sa perception du modèle, mais elle ne s’exprime pas là-dessus. Comme le professeur aime parler, c’est plutôt lui qui se met à parler à la classe en lançant des gros statements comme « les artistes les plus discrets sont souvent les meilleurs », beau compliment pour l’étudiante que ça visait, vraiment.

Mais ça se gâte.

« C’est comme les femmes… » J’ai fixé mon dessin et tenté de faire un « lalalalala » en me bouchant les oreilles, à la façon Les beaux malaises, mais je ne l’ai pas vraiment fait.

« Les femmes qui ne savent pas qu’elles sont belles sont toujours plus jolies ». J’ai roulé les yeux vers le ciel. J’ai voulu renvoyer son constat du côté masculin, pour provoquer, mais mon argument ne tenait pas; un homme humble et naïf, ce n’est pas typiquement ce qu’on recherche. En fait, ça ne correspond simplement pas à aucun « lieu commun ». L’étudiant qui parle toujours pour ne rien dire s’est joint à la conversation et j’ai réellement décroché.

J’ai hâte au jour où il n’y aura plus de gêne pour une femme de se trouver belle ou talentueuse. À ce jour où nous pourrons être confiantes et que ce soit approuvé par la masse. Au jour où nous pourrons briller et ne pas nous le faire reprocher. Au jour où ce ne sera plus difficile de trouver un partenaire de vie qui nous trouve attirante, même lorsqu’on se fait belle pour une occasion qui ne le concerne pas. Qu’on sorte un peu du moule de femme-innocente-et-soumise-à-la-maison. Sortons-nous de la tête qu’une femme doit rester humble avec son look et ses compétences pour être appréciée de la gente masculine. Juste ça, ce serait fabuleux.